| Articles divers
La constipation intellectuelle moderne - Article 2
Vous le savez, j’ai lancé le projet d’une série d’articles, visant à “décrypter” simplement, toutes ces belles phrases, remplies de mots savants, que l’on peut lire un peu partout, et qui visent surtout à perdre le maître dans des méandres d’incompréhension.
Si vous ne l’avez pas lu, je vous invite à lire l’article 1 qui traitait du sujet de “l’homéostasie”. A la fin de l’article je demandais au lecteur quel pourrait être le thème de l’article 2. J’ai eu quelques réponses, mais une en particulier m’a fait “tilter”. Pourquoi ? Parce que ce sont des termes que je peux lire un peu partout, et qui font partis des fameuses “phrases obscures” qui font rentrer le maître dans un tunnel de complications...
Le thème proposé : “Les déficiences de la ritualisation des comportements agonistiques”...
Oulalaaaaa, je vous vois venir, vous commencez déjà à avoir mal au crâne !!!! Merci à mon ami Philippe Roustant qui a été “taquin” avec cette proposition de thème ;-)
Mais je relève le défi de tenter d’expliquer cette notion de manière simple !
Pour commencer, qu’est ce qu’un comportement agonistique ?
Il s’agit de l’ensemble des comportements liés aux confrontations entre des individus. Que ce soit des individus de la même espèce (intraspécifique) ou d’espèces différentes (interspécifique). C’est l’ensemble des comportements d’agression (menace, confrontation, attaque mais aussi soumission, attitude d’apaisement, fuite). Mais attention cela n’englobe pas les comportements de prédation.
Lors de l’observation d’un comportement d’agression, on observe 3 phases : la menace, l’attaque, et l’arrêt.
La phase de menace est une phase “d’avertissement” (phase appétitive) qui se traduit par des postures hautes (corps gonflés, musculature tendue, levée de queue, démarche rigide...), des grognements, des aboiements, des levées de babines, des montrés de crocs, ...
La phase d’attaque (phase consommatoire) est bien plus spectaculaire. Cette phase existe si aucun des deux individus n’a “cédé de terrain” lors de la phase de menace... Elle se traduit par des bousculades, des coups de patte, des coups de dents, des morsures...
La phase d’arrêt (phase de stabilisation) est enclenchée lorsque l’un des deux individus envois des signaux de renoncement au combat. Elle se traduit par un chien qui va enclencher des postures de soumissions. Cette phase est à l’initiative de l’individu qui renonce au combat, elle n’est pas le résultat d’une soumission forcée...
Lors d’un comportement d’agression, les trois phases ne sont pas obligatoires. Lors de la phase de menace, l’un des deux individus peut mettre fin au conflit (c’est d’ailleurs fréquemment le cas...) en adoptant un comportement de soumission, des postures d’apaisement, de la distanciation par l’éloignement ou de la fuite.
Les déficiences de ritualisation des comportements agonistiques
Le but de ces comportements agonistiques est de résoudre un conflit avec un autre individu. La plupart des comportements d'agression servent justement à éviter l'agression. Dans un groupe social stable, les comportements agonistiques sont réduits aux relations de dominance et de subordination.
Ces comportements agonistiques sont hautement ritualisés. Nous l’avons vu, cela se traduit par une série d’attitudes corporelles, de postures, de grognements, ...
Le chien a appris ces comportements agonistiques au contact de sa mère, de son père, de sa fratrie, et des chiens qu’il aura rencontré lors de sa croissance.
Lorsque l’apprentissage de ce mode de communication n’a pas été fait (chien en hypo-stimulations, absence de la mère, absence de contacts canins lors des premières semaines de vie,...) ou a été mal réalisé (chiot en contact avec des individus canins non équilibrés), on assiste à une déficience de l’apprentissage de cette ritualisation des comportements agonistiques. C’est le point de départ d’un chien qui ne saura pas communiquer, et pourra déclencher des troubles du comportement (type peur ou agressivité).
Nous pouvons également assister à un chien doté d’une bonne communication canine (d’une bonne ritualisation des comportements agonistiques), qui va “s’enfermer” dans un trouble du comportement suite a une expérience traumatisante. Par exemple, un individu canin qui n’aura pas répondu “normalement” à ses tentatives de communication et aura été dans l’agressivité pure, malgré toutes ses tentatives d’apaisement voire de soumission.
Autre exemple : l’absence de communication canine prolongée peut également créer une extinction de cette ritualisation des comportements agonistiques... Pour résumer le chien avait appris à parler, mais à force de rester silencieux (par exemple en ne voyant plus de congénères pendant des années), il a “oublié” le sens du vocabulaire qu’un autre chien lui propose...
Des chiens aux caractères souples et malléables, ayant toujours été en contact avec des individus de même type, et ayant l’habitude d’interactions modérés, peuvent également se trouver démunis face à des chiens inconnus dotés de tempérament beaucoup plus fort.
Pour résumer simplement
Les chiens discutent entre eux... Pour l’humain, c’est parfois très inquiétant voire traumatisant, tant les discussions canines peuvent paraître “spectaculaires”... Mais ce sont des chiens, ils ont leur vocabulaire, et leur propre manière de gérer les conflits éventuels... Encore une fois, une bonne socialisation lors des première semaines de vie, ainsi que des rencontres fréquentes au cours de sa vie avec des chiens équilibré de tous types et de toutes hauteurs de tempérament, pourra aider votre chien a bien communiquer !
Roseline Pupier - Educateur canin